Compte rendu d’une verticale vertigineuse de Cos d’Estournel de 2001 à 1929 :
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Club toulousain In Vino Veritas
Verticale du château Cos d’Estournel en 32 millésimes de 2001 à 1929.
Octobre et novembre 2006
Dégustation préparée par Didier Sanchez et commentée par Vincent Ravenne pour l’après-midi.
Quelques commentaires de contexte :
La dégustation s’est déroulée en deux phases : l’après-midi avec 6 dégustateurs puis le soir avec 8 dégustateurs. Didier Sanchez a participé aux deux séances.
Comme d’habitude pour les vins de garde, le carafage a été bénéfique à l’ensemble des vins. Les notes de Didier Sanchez (DS AM et DS SOIR) sont le reflet de ces variations.
Nombre de dégustateurs : 14.
DS : Didier Sanchez – PC : Pierre Citerne – MS : Miguel Sennoun, CD : Christian Declume et VR: Vincent Ravenne pour la dégustation de l’am.
1ère verticale du vendredi 13 octobre :
1. Cos d’Estournel 2001:
DS AM16,5 – CD16,5 – VR16+. Note moyenne AM : 16,3.
DS SOIR16,5/17 – PC16,5 – MS16,5. Note moyenne SOIR : 16,6.
Robe foncée, sans le moindre signe d’évolution. Nez explosif de cèdre et de fruits noirs. Le verre posé sur la table, des effluves remontent vers le nez, annonciatrices de plaisir. La bouche est jeune, puissante, astringente. Une certaine amertume se développe en arrière de la trame tannique. L’ensemble est porté par une très belle acidité qui allonge le vin et le soutien dans une superbe finale fraîche.
2. Cos d’Estournel 2000 :
DS AM16 – CD15,5 – VR16,5. Note moyenne AM : 16.
DS SOIR17,5 – PC17/17,5 – MS17,5. Note moyenne SOIR : 17,4
Robe noire, intense. Le nez fait plus mur, avec des épices. En bouche, c’est bien mur, plus large, ample, un poil confituré. Beaucoup moins tendu que le précédent, ce gras lié à la maturité me plait même si le 2001 risque de beaucoup mieux vieillir. La bouche termine relativement fraîche sur des notes mentholées.
3. Cos d’Estournel 1999 :
DS AM14,5 – CD14,5 – VR14. Note moyenne AM : 14,3.
DS SOIR14,5 – PC14 – MS14. Note moyenne SOIR : 14,2
Robe très évoluée, surtout pour un 99. Le nez est très peu plaisant, sur le poivron, la vase. Au début, j’ai songé à un problème de bouchon mais l’ensemble a plutôt bien évolué tout en restant faible et végétal. La bouche est plus plaisante, fine et élégante. Une légère amertume s’y développe, l’ensemble est porté par une trame légèrement acide avec des tanins. A boire rapidement.
4. Cos d’Estournel 1998 :
DS AM16 – CD16 – VR15. Note moyenne AM : 15,7
DS SOIR17 – PC17 – MS16,5/17. Note moyenne SOIR : 16,9
Nez tout en finesse, équilibré mais on attend mieux du cru.
La bouche est en demi-corp, sur le fruit et la réglisse. L’acidité emmène l’ensemble tranquillement.
Un vin correct qui n’émeut pas les foules avec une qualité globalement correcte mais un rapport QP nul.
5. Cos d’Estournel 1997 :
DS AM14 – CD15 – VR13-. Note moyenne AM : 14,75
DS SOIR15 – PC15 – MS15. Note moyenne SOIR : 15.
Robe légèrement évoluée sur le disque.
Sans agiter, on plonge le nez dans le verre (Vert ? ? ?) pour découvrir un superbe jus de poivron vert, très pur.
On agite et ainsi, un peu de poivron rouge apparaît. L’ensemble est franchement végétal tout juste un point de zan apparaît. En bouche, même tableau. Un vin sans intérêt, pas mauvais mais à éviter.
6. Cos d’Estournel 1996 :
DS AM17,5/18 – CD17 – VR17,+. Note moyenne AM : 17,5.
DS SOIR18 – PC18 – MS18. Note moyenne SOIR : 18.
Enfin le retour d’une jolie robe. Elle fait son age, sans plus. Au nez, très belle complexité, cassis, tabac, café, réglisse. En bouche, c’est fin, racé, savoureux. La matière est là mais ne s’impose pas, elle glisse, elle caresse. C’est frais, fin, mur, long et tendu…superbe. Un vin dont je n’ai pas pu cracher la fin de verre ! Un grand vin qui fait parler sa race.
7. Cos d’Estournel 1995 :
DS AM17 – CD17 – VR17. Note moyenne AM : 17.
DS SOIR16,5 – PC16 – MS16 – Note moyenne SOIR : 16,2.
La robe est moins évoluée que celle de son cadet. Le nez est intense, mur, sur le zan, le cassis, la mure, avec des notes de cèdre et de café. La bouche est lissée, épaisse, avec une astringence en fin de bouche. Un grand vin à maturité. J’aime ! Là encore, j’ai fini le fond de verre.
8. Cos d’Estournel 1994 :
DS AM14,5 – CD14,5 – VR14. Note moyenne AM : 14,3.
DS SOIR15,5 – PC15,5 – MS15. Note moyenne SOIR : 15,3.
Robe évoluée. Nez bizarre, un peu sur le caoutchouc… ? En bouche, l’ensemble est frais mais très léger. Insuffisant pour le standing du château. A boire vite
9. Cos d’Estournel 1993 :
DS AM15 – CD14,5 – VR14. Note moyenne AM : 14,5.
DS SOIR14 – PC14 – MS14,5 – Note moyenne SOIR : 14,2.
Robe évoluée et diluée ; la plus claire de la verticale. En bouche, c’est végétal, un peu caoutchouc. En bouche, ce n’est pas mauvais mais venant après 95 et 96, on n’a pas envie d’en parler. A boire vite
10. Cos d’Estournel 1992 :
DS AM12 – CD12,5 – VR11. Note moyenne AM : 11,8.
DS SOIR13,5 – PC13,5 – MS14. Note moyenne SOIR : 13,7.
Robe claire, mate, un peu grise. Le nez est peu plaisant, acide. En bouche, c’est insipide, acide, fuyant.
11. Cos d’Estournel 1991 :
DS AM14,5 – CD13 – VR14,5. Note moyenne AM : 14.
DS SOIR15 – PC16 – MS16. Note moyenne SOIR : 15,7.
Un vin dont j’attendais beaucoup. La robe est évoluée, brillante. Le nez est sur un léger fruité avec des notes de caramel… ? Chaptalisé ? La bouche est un peu végétale, caramel avec des tanins moins un poil grossier.
Un vin en deçà de mes espérances mais le passer dans un verticale ne l’arrange pas.
12. Cos d’Estournel 1990 :
DS AM16 – CD14,5 – VR17+. Note moyenne AM : 15,8.
DS SOIR16,5 – PC16,5 – MS16,5. Note moyenne SOIR : 16,5.
Robe intense, légèrement évoluée, brillante. Le nez est complexe, fondu, épicée, presque sudiste avec du café. La bouche est très belle, avec des fruits murs, des épices, des griottes à l’eau de vie, du menthol.
C’est puissant, gras, long, bon. Un beau vin à maturité.
13. Cos d’Estournel 1989 :
DS AM17 – CD16 – VR16,5. Note moyenne AM : 16,5.
DS SOIR17 – PC16,5 – MS17. Note moyenne SOIR : 16,8.
Superbe robe brillante. Au nez, on est sur des notes tertiaires, réglisse, menthol avec des notes de fourrure, animales. En bouche, c’est épais, frais et bon. Un boisé intégré, des tanins fins mais présents, des épices.
14. Cos d’Estournel 1988 :
DS AM17,5 – – CD17,5 – VR16,5. Note moyenne AM : 17,2.
DS SOIR17,5+ – PC17 – MS17,5. Note moyenne SOIR : 17,3.
Robe plus profonde et moins évoluée que celle des 89/90. Le nez est très classique, médocain, boite à cigare, fruits noirs. En bouche, c’est jeune, fruité, frais racé avec des notes de réglisse. Belle matière, beaucoup de tanins, ce vin ne fait pas son age.
Beaucoup plus classique que 89 et surtout que 90, ce vin demande à attendre encore
15. Cos d’Estournel 1987 :
DS AM12,5 – CD12,5 – VR12,5. Note moyenne AM : 12,5.
DS SOIR13 – PC13 – MS14/14,5. Note moyenne SOIR : 13,4.
Robe très évoluée Nez végétal, un poil de choux et du sucre…nettement. En bouche, c’est liquide, court avec des tanins grossiers .Un vin qu’on imagine chaptalisé, sans grand intérêt.
16. Cos d’Estournel 1986 :
DS AM17 – CD17 – VR16. Note moyenne AM : 16,7.
DS SOIR17 – PC17,5 – MS17,5. Note moyenne SOIR : 17,3.
Robe, jeune, intense, brillante et très peu évoluée. Le nez est fermé, sur des petits fruits et demandera sans doute un long carafage pour s’exprimer La bouche est droite, tendue, longue, avec des notes de réglisse sur le fruit.
Le vin semble manquer un poil de puissance mais en finale, les saveurs du vin persistent très longtemps (Une heure après, je le sentais encore).
2ème verticale du vendredi 10 novembre :
Quelques commentaires de contexte :
En raison de l’ancienneté des millésimes, une seule dégustation le soir.
Les niveaux des bouteilles étaient particulièrement beaux : haute épaule pour les plus bas.
Nombre de dégustateurs : 15.
DS : Didier Sanchez – PC : Pierre Citerne – MS : Miguel Sennoun, CD : Christian Declume.
Dégustation préparée par Didier Sanchez et commentée par Pierre Citerne.
01. Cos d’Estournel 1985 :
DS15 – PC15 – MS15,5 – CD14,5. Note moyenne : 15.
– Robe moyennement intense, rubis mat.
– Beau nez classiquement médocain, au fruit plutôt discret, marqué par les épices, le poivron rouge, le tabac, les bois précieux (cèdre, santal), mais qui à l’aération s’affadit plus qu’il ne se développe.
– Une attaque précise, une chair moelleuse, un grain fin, une saveur racée, mûre mais fraîche, laissent augurer une harmonieuse plénitude. On reste pourtant sur sa faim, avec la sensation d’une matière étriquée en milieu de bouche, presque diluée, fuyante, qui finit sur une note mesquine d’acidité pointue. Bouteille décevante par rapport à la bonne réputation de Cos d’Estournel 1985.
02. Cos d’Estournel 1984 :
DS14 – PC14 – MS14 – CD16. Note moyenne : 14,5.
– Rouge grenat encore assez dense.
– Expression aromatique marquée par des notes herbacées « dures », mais plutôt plaisante et même enlevée : épicée, fumée, organique.
– Matière mince, vive, encore cohérente et pas trop anguleuse ; saveur végétale et camphrée développant une certaine complexité, finale acide mais décidée. Une réussite dans le contexte du millésime.
03. Cos d’Estournel 1983 :
DS14,5 – PC14 – MS15 – CD15. Note moyenne : 14,6.
– Robe nettement brunie, évoluée, évoquant le brou de noix.
– On retrouve ce même brou de noix au nez, dans un bouquet étrange, cuit, évoquant plus un vieux châteauneuf ou un Byrrh qu’un bordeaux (ou à la rigueur un vieux merlot…) : peau d’orange, pruneau, nuoc-mâm, fond de viande…
– Matière très souple, ronde, peu acide, viandée, lâche, courte. On s’interroge sur la conservation de la bouteille.
04. Cos d’Estournel 1982 :
DS17,5 – PC17,5 – MS17,5 – CD16,5. Note moyenne : 17,3.
– Robe dense, centre sombre, bordure dégradée jusqu’à l’acajou.
– Nez plein, ample et profond, qui laisse deviner le caractère pulpeux du vin. Beaucoup de race dans ces arômes complexes, nuancés, fins, très classiquement médocains : beaucoup d’épices, du tabac, du camphre, du bois de cèdre, du moka, de la terre battue…
– Moelleux dès l’attaque, le vin ne se montre jamais lourd ni mou. Très savoureux, articulé, plein, il fait preuve d’une vraie noblesse aromatique et structurelle. Seule la finale un peu chaleureuse trahit un millésime particulièrement solaire.
05. Cos d’Estournel 1981 :
DS14,5 – PC15,5 – MS15,5 – CD14,5. Note moyenne : 15.
– Aspect assez dense.
– Nez ouvert, épicé, organique (viandé), évoquant celui du 83, en moins « cuit ».
– Le vin se montre plein et vivant en bouche, souple, fondu, avec des tannins grumeleux qui ressortent en finale ; satisfaisant, il est pourtant bien loin de posséder la race du 82.
06. Cos d’Estournel 1980 :
DS14 – PC13,5 – MS14 – CD14. Note moyenne : 13,9.
– Peu d’éclat dans cette robe grenat évoluée.
– Premier nez franchement désagréable, liégeux ; des relents de carton humide, de poivron vert, de foin moisi témoignent d’un manque de maturité certain. On peut ensuite percevoir une certaine distinction dans les notes fumées et épicées qui émergent à l’aération.
– On ressent la verdeur du fruit dès l’attaque, une saveur terreuse peu flatteuse, mais aussi une certaine tenue, une concentration honorable, de tannins saillants sans être décharnés. A l’image du 84, un millésime difficile proportionnellement bien réussi, et qui a vaillamment résisté aux outrages du temps.
07. Cos d’Estournel 1979 :
DS13 – PC11 – MS12,5 – CD13. Note moyenne : 12,1.
– Robe pourtant assez dense et sombre…
– Joli nez fumé et viandé, un peu diffus, nettement tertiaire, avec quelques notes de fleurs fanées intéressantes.
– La bouche ne suit pas, atone, creuse, elle ne propose plus qu’un squelette acide.
08. Cos d’Estournel 1978 :
DS14,5 – PC16,5 – MS16 – CD13,5. Note moyenne : 15,1.
– Aspect mat, évolué.
– Nez de grand relief, au fruit encore présent mais dominé par un caractère très animal (gibier à poil et écurie, pansement…), terreux (minéralité évoquant le camphre et la mine de crayon), poivré… Un bouquet complexe et racé (pour moi proche d’un grand Pauillac), mais certainement pas d’une séduction évidente…
– Bouche présente, mince, acide, tannique ; racée mais austère dans sa structure, elle porte avec panache, jusqu’en finale, la gamme aromatique complexe rencontrée dans le bouquet. Le 79 était mort, le 78 est bien vivant.
09. Cos d’Estournel 1975 :
DS14 – PC14 – MS15 – CD14. Note moyenne : 14,3.
– Robe assez dense, brillante, dégradé allant du grenat jusqu’au fauve.
– Le fruit est bien présent au nez, mûr, légèrement poussiéreux, souligné par des notes de tabac et d’épices douces.
– Bouche concentrée, solaire, trapue, plutôt agréable et bien vivante mais dépourvue de finesse, franchement rustique. Si le vin paraît nettement plus mûr et plus dense que le 78 il est surtout beaucoup moins racé.
10. Cos d’Estournel 1970 :
DS15,5 – PC15 – MS15 – CD14. Note moyenne : 14,9.
– Robe dense, bien en place.
– Nez évolué mais possédant encore du fond : vieux cuir, réglisse, cèdre, Viandox, caramel…
– On ressent en bouche une certaine plénitude, la texture est sérieuse et constante, la saveur franche, dominée par le cèdre. L’impression finale n’est pas complètement satisfaisante, les tannins apparaissent vite secs, l’acidité ressort trop en finale, avec un caractère métallique.
11. Cos d’Estournel 1959 :
DS18 – PC18 – MS18,5 – CD16. Note moyenne : 17,6.
– Robe fauve, mate, déjà bien dépouillée ; on a franchi un palier dans l’évolution.
– Magnifique nez sans usure, complexe, expressif ; on retrouve, au travers des notes minérales, épicées et organiques (cuir de Russie ?), la noblesse et la subtilité aromatique du 82.
– Avec cette matière solaire, intense, mais pourtant retenue et précise, on a tout ce qui fait un grand médoc ; des tannins fins et remarquablement sereins, l’élégance, la profondeur, la sapidité, l’autorité… Ce vin se montre décidément proche du 82, avec une modestie dans la charge alcoolique qui lui confère un équilibre plus souverain encore.
12. Cos d’Estournel 1955 :
DS14,5 – PC15 – MS16 – CD14,5. Note moyenne : 15.
– Nez viril, très mûr, presque « sudiste », raisiné ; des notes d’écorce d’orange confite, de vieux cuir, de fenouil, de bouillon Kub…
– Ce caractère presque surmûr se retrouve en bouche, ainsi qu’une saveur viandée de bouillon envahissante ; le volume est conséquent, les tannins sont présents, carrés (avec la même rusticité que ceux du 75), l’acidité marquée. Un vin fortement constitué, encore assez gaillard, mais maladroit, si ce n’est malgracieux.
13. Cos d’Estournel 1953 :
DS17 – PC17 – MS17 – CD17 Note moyenne : 17.
– L’évolution de la robe franchit un nouveau seuil, la bordure du disque est devenue ambrée.
– Nez fondu et complexe, automnal et séduisant : vieux cuir, sous-bois humide, notes camphrées et mentholées…
– La bouche est souple, savoureuse, avenante ; elle a conservé toute l’élégance du millésime, même si la structure commence à devenir saillante. Racé, encore juteux, ce vin s’exprime dans la même veine « classique » et harmonieuse que le 59, même s’il s’avère un peu moins plein et intense.
14. Cos d’Estournel 1949 :
DS16,5 – PC17 – MS17 – CD13 Note moyenne : 16,5.
– Robe très claire, comme du café américain.
– Nez dépouillé, éthéré ─ presque bourguignon ! Des notes pénétrantes de rose fanée et de fumée lui confèrent une séduction désincarnée touchante.
– Acide, mince, mais sans être du tout atone ou squelettique, la bouche confirme que le vin a quitté ses oripeaux terriens/terrestres. Demeure une persistance aromatique de grand charme et d’une réelle noblesse. Un médoc pour les amateurs de pinot…
15. Cos d’Estournel 1945 :
DS17,5 – PC17 – MS17,5 – CD16. Note moyenne : 17.
– Robe fauve, intense, encore sombre, chargée de beaucoup de dépôt.
– Expression aromatique très pleine, profondément terrienne et solaire, large et profonde, légèrement durcie par une acidité volatile un peu marquée. Le vieux cuir, la mine de crayon, la noix sèche et le cèdre définissent un bouquet très médocain, en pleine possession de ses moyens.
– Attaque ronde, large, très mûre ; la suite est plus carrée… Le vin possède énormément d’extrait sec, une forte acidité, une structure tannique impressionnante, grenue, très longue, une saveur profonde, épicée, confite, presque goudronneuse. Ce vin assez herculéen ─ l’antithèse du diaphane 49 que nous venons de goûter ─ est à la hauteur du mythe de son millésime.
16. Cos d’Estournel 1929 :
DS17 – PC16,5 – MS17 – CD16. Note moyenne : 16,6.
– Robe brune, couleur de bure, assez soutenue.
– Nez complexe, nuancé ; il faut être entièrement à son écoute pour distinguer les différentes fleurs fanées, les épices, les cuirs, les notes fumées et minérales… et tout au fond la vibration d’un fruit qui résonne encore.
– Souple, arrondi, encore assez dense, le vin paraît pourtant fragile en bouche, tout en arômes. La matière semble comme apaisée, elle a fini son long voyage ; la saveur est tout d’abord très épicée, nettement minérale ensuite, avec une note entre le graphite, l’encre de Chine et la terre noire humide qui perdure bien au-delà des impressions tactiles, le goût du terroir ?
Pirate et à l’aveugle en souvenir de la verticale de Las Cases de mars 2005:
17. Léoville Las Cases 1959 :
DS18,5 – PC18,5 – MS18,5 – CD18. Note moyenne : 18,5.
– Robe évoluée mais très dense.
– Le bouquet est puissant, viril, parfaitement racé ; très animal au début (tripes de poulet), il évolue vers des notes de cèdre, de tabac et de menthol.
– Dense, ferme, très structuré en bouche (tannicité très présente, sans sécheresse), long et dynamique, Las Cases 59 se montre peut-être un peu moins nuancé et élégant que Cos du même millésime, mais plus intense, plus jeune et plus tranchant, et tout aussi racé. Deux grands médocs.
Commentaires (Miguel Sennoun) en mars 2005 de Léoville Las Cases 1959 :
DS18,5/19 – MS19 – PC19. Note moyenne du groupe : 18,5/19
Robe encore bien sombre et très belle.
Nez énorme qui combine tous les éléments d’un grand vin : complexité, beauté des arômes, race. Il est si présent qu’on en mesure toute la beauté avant même d’avoir mis son nez dans le verre.
Bouche sublime de fraîcheur et de race qui rappelle le 66 avec une matière plus posée. La gourmandise de ce vin, qui parait encore si jeune, fait l’unanimité.
La magie de croiser un grand vin à maturité est une expérience rare. Une très bonne surprise.
Conclusion (Pierre Citerne) :
Les millésimes récents de Cos d’Estournel se montrent homogènes, d’un classicisme médocain de haut niveau ; seul 1999 apparaît en deçà de ce qu’on pouvait attendre. La forte proportion de merlot (40% en moyenne) se laisse deviner au travers de structures plus rondes que chez d’autres marques célèbres, et, dans certaines années, d’expressions aromatiques confites et viandées, confinant au pruneau et à la daube de bœuf. Sur les vins jeunes, l’élevage apparaît flatteur mais intelligemment dosé, sans exagération. Les petites années sont le plus souvent très honorablement réussies. 2001, 2000 et 1996 promettent beaucoup. Comme souvent, nous avons globalement préféré les « classiques » 1988 et 1986 aux « solaires » 1990, 1989 et 1985. De 70 à 85, seul le 82 soulève l’enthousiasme.
Les millésimes plus anciens, de 1959 à 1929, il est vrai choisis parmi les grandes années, se sont tous montrés très typées, vivants, complexes, riches d’émotion et de nuances. Cette capacité de bien vieillir, aussi bien que les grands Pauillac voisins, confirme la qualité du terroir de Cos d’Estournel.