La dégustation, proposée par Attila Aranyos, est commentée par Laurent Gibet pour la séance du soir.
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Toutes les bouteilles proviennent directement du domaine.
Elles ont été placées dans une cave de service, à température adaptée, verticalement, 6 jours avant notre rendez-vous.
Cette dégustation s’est déroulée en deux séances : l’après-midi à 14h15 puis le soir à 19h30.
Ce compte-rendu détaille les impressions du soir.
Entre autres causes, une aération de 5 heures (dans la bouteille rebouchée en position verticale) peut expliquer les variations dans les appréciations.
Les vins sont dégustés sans présentation à l’aveugle.
Les verres utilisés sont les « Expert » de Spiegelau.
DS : Didier Sanchez – LG : Laurent Gibet – CDC : Cécile Debroas Castaigns – FM : François Martinez – AA : Attila Aranyos – HC : Hervé Cuzon.
La cave Germano Angelo a été fondée en 1908. Le domaine a été transmis de père en fils au fil des générations. Les vins sont actuellement élaborés par Davide Garmanio junior, qui a également contribué à la modernisation du domaine et à l’acquisition de nouvelles parcelles. La cave se trouve à La Morra (zone des Rocche dell Annunziata) et la salle de dégustation à Barolo.
Domaine discret, les vins de la famille Germano Angelo apparaissent rarement dans les guides ou les magazines de vin, la tradition familiale étant d’être directement impliqué dans la promotion de son produit, de préférer le contact direct avec les clients finaux.
Ils ont des parcelles à Barolo, La Morra et Monforte, et ils produisent tous les cépages typiques (Dolcetto, Barbera, Nebbiolo) et aussi quelques blancs à base de Chardonnay.
Les parcelles les plus importantes sont :
Situé à 280-320m, juste après la colline Cannubi, fond de vallée entre La Morra et Barolo, en tournant vers Liste, puis (en traversant vers La Morra) La Serra et Brunate. Majoritairement (80%+) planté de Nebbiolo, produit typiquement des vins de bonne structure, bien équilibrés et agréablement austères.
Près de 11ha, 73% planté en Nebbiolo. Altitude un peu plus faible 220-255 m, en descendant de l’Annunziata, mais elle est amplement compensée par la qualité du sol. Les vins ont une structure tannique raisonnablement rugueuse avec des sensations agréables d’harmonie et d’équilibre.
Bussia est l’un des premiers “crus” déclarés en 1961 dans le Barolo. Vaste (près de 300 ha) et plutôt hétérogène abritant quelques superstars du Barolo ainsi que des vins marginaux.
Dardi & Mondoca sont considérés comme faisant partie de Bussia Soprana, ont toujours bénéficié d’une identité particulière grâce à l’excellente exposition. Le noyau de Dardi autour du hameau du même nom se distingue du sommet de la colline Mondoca. Les vins sont des Barolos classiques, minéraux, aux tanins parfois rugueux. Au sommet de la colline, ils sont plus pleins et plus amples mais pourraient être moins subtils.
(Nombre total de dégustateurs : 16)
A l’ouverture : DS15 – CDC15,5 – AA16
Après 5 heures d’aération : DS15 – LG16 – FM15 – HC15,5
Robe plutôt claire. Nez affriolant mêlant des senteurs appétentes de confiture de fraises, de zeste d’orange, de fleurs, d’épices. Volume moyen. Caractère charmeur pour un bel équilibre d’ensemble (alcool, acidité, tannins). Remarquable rapport qualité/prix.
Rappel :
Angelo Germano LANGHE NEBBIOLO VISETTE 2017 : 16,5/20 – 24/6/2021
Expression traditionnelle de qualité, élégante avec une bonne structure (maturité, acidité, alcool et tannins). S’aborde bien dans cette jeunesse.
A l’ouverture : DS17+ – CDC17 – AA17+
Après 5 heures d’aération : DS17,5 – LG17+ – FM16 – HC17
Robe nettement plus foncée que dans le cas du vin précédent. La qualité du millésime implique une profondeur de champ pour des parfums de gelée de cerises noires, de guignolet, de quinquina, de graphite, avec une touche terrienne et de fumée. Rentré, compact, pour une formidable allonge subtilement amère. On a là un superbe vin, de style traditionnel me semble-t-il (mais on peut souffle qu’il y a un peu de barrique, que je ne détecte absolument pas) dont il sera intéressant, vu les constats décevants que nous observerons sur les vins plus âgés, de surveiller la durée de vie.
A l’ouverture : DS15,5 – CDC15,5 – AA16
Après 5 heures d’aération : DS15,5 – LG15,5 – FM14 – HC16
Vin fruité, floral et épicé comme il se doit, assez faible mais serein, avec une déficience en matière et des tannins plus saillants. Cette cuvée est élaborée à partir de vignes de Barolo qui ne sont pas destinées à élaborer des crus (communes de La Morra, Barolo et Monforte d’Alba).
Pour info :
Angelo Germano Barolo Trevigneti 2015 : 16/20 – 25/10/2021
Produit sur des vignes de Barolo, la Morra et Monforte d’Alba.
Robe pâle, de teinte orangée.
Jolies notes typées de fleurs, de camphre (cardamome), de zeste d’agrumes, de fraises écrasées, de taille de crayon noir.
Intensité moyenne pour ce vin élégant, parfumé, corsé, doté d’un arrière-fond tannique qui reste discret.
Piste évoquées, à l’aveugle, autour de la table : grenache de Madrid, Etna (nerello mascalese), Piémont, Langhe … « un faux maigre légèrement sucrant » …
A l’ouverture : DS16,5/17 – CDC16,5 – AA17
Après 5 heures d’aération : DS17 – LG17 – FM16 – HC17
Typé, profond, avec des notes de fruits rouges, de terre. Ce vin assez austère, aux tannins poudreux caractéristiques et à la volatile un peu plus sensible est à attendre encore quelques années.
A l’ouverture : DS17,5 – CDC17 – AA17,5
Après 5 heures d’aération : DS17,5 – LG17,5 – FM17 – HC17,5
Fruits, fleurs, épices, fond d’artichaut, quinquina … forment un beau panel aromatique familier, unifié et typique. Charme, cohérence et longueur de trame pour cette expression parfaitement sapide, sans interruption de goût. Un régal pour ce vin assez libéré, plus aimable que le Bricco Rocca 2015.
Rappel :
Angelo Germano Barolo Rué 2015 : 17,5/20 – 5/9/2020
Très beau style à l’ancienne, tant du point de vue des arômes que de la structure. Découverte et rapport Q/P.
A l’ouverture : DS17,5/18 – CDC17,5 – AA18
Après 5 heures d’aération : DS18 – LG18 – FM17,5 – HC17+
On trouve ici des notes de griotte et de betterave fumée qui peuvent un peu évoquer le pinot noir. Stature, corpulence équilibrée pour une trame puissante, savoureusement longue.
A l’ouverture : DS16,5 – CDC17 – AA17
Après 5 heures d’aération : DS16 – LG16 – FM16 – HC16
Expression relativement simple, viandée, corsée, riche et acidulée (griotte), de puissance moyenne.
A l’ouverture : DS(14,5/15)– CDCED – AA16
Après 5 heures d’aération : DS(15) – LG(14) – FMED – HC15,5
Surmûr (pruneau), nuoc-mam pour un vin oxydé qui a probablement pris un “coup de chaud”. Assez concentré, souple, et on peut penser à un grenache du Roussillon. Alors certes, ce vin n’est pas très acceptable et semble dépaysé, mais, permissivement, je ne le jette pas totalement aux orties.
A l’ouverture : DS17,5 – CDC17,5 – AA17,5
Après 5 heures d’aération : DS17,5 – LG17 – FM17,5 – HC17,5
Début d’évolution tertiaire (sous-bois à champignons, menthe, …). Ce vin bouqueté, cohérent et long, de belle vitalité, semble en apogée.
A l’ouverture : DS17,5/18 – CDC18 – AA18
Après 5 heures d’aération : DS18 – LG18 – FM17,5 – HC18
On sent d’emblée la qualité du millésime. Corne d’abondance olfactive avec ces attendues senteurs puissantes et agréables de fleurs, d’épices, de fruits, de quinquina, de graphite. Puissant et complexe, de grande classe tannique, dynamique, terriblement sapide. On peut commencer à le boire car le plaisir est vraiment au rendez-vous.
A l’ouverture : DS18,5 – CDC18 – AA18
Après 5 heures d’aération : DS18,5 – LG18 – FM18 – HC18
L’énorme potentiel du millésime (à l’instar de 2016) permet ici un vin de garde compact, graphité, complexe, équilibré. Robuste élégance, plus stricte que dans le cas du Rué 2010. Attendre.
A l’ouverture : DS18,5/19 – CDCED – AA19
Pour Didier et Attila : les poils des bras se hérissent tellement l’émotion est intense sur ce vin profond (malgré une première approche méfiante en raison des arômes, selon Didier).
Pour Cécile et une partie des autres dégustateurs présents, vin quasiment à défaut (aromatique pas satisfaisante, soja) !
Après 5 heures d’aération : DS(16) – LG(14) – FMED – HCED
Je trouve ici des notes dépréciatives de sauce soja, de zan. Bouche fanée, au goût faussé, mais je ne la voue pas définitivement aux gémonies car elle possède quelques restes structurels honorables.
Un tel grand écart de notation entre après-midi peut sembler parfaitement irréaliste. Nous avons déjà évoqué ce genre de symptôme chez IVV (par exemple pour un “faussement solide” Montrachet 2002 de Jadot). Je n’y reviendrai pas en détail. Il est complexe (ici en acmé et nous n’avons pas de laboratoire d’analyses pour investiguer le problème, les résultats de ce même laboratoire ne réglant de toute manière pas définitivement le problème). Il trouve des pistes d’explication dans la complexité de l’analyse sensorielle (et donc plus précisément dans la complexité de la nature humaine – voir par exemple comment un vin peu protégé peut être jugé déviant et inqualifiable – comme faute oenologique – par certains et, dans le même panel hétérogène de dégustateurs, d’un naturel admirable – en respectable et même nécessaire prise de risque – par d’autres).
A l’ouverture : DS16 – CDC(15) – AA16
Après 5 heures d’aération : DS(14) – LG(14) – FMED – HCED
De nouveau, la présentation n’est pas satisfaisante. Le vin est fatigué, avec ses notes de marinade rappelant une daube de boeuf (bouquet garni mais surtout sauce soja trop présente).
A l’ouverture : DS17,5/18 – CDC17 – AA17,5/18
Après 5 heures d’aération : DS17 – LG16 – FM16,5 – HC17,5
Corsé et acidulé (griotte, réglisse). Beau volume pour un vin conduit par l’acidité et des tannins insistants (une rigueur tannique que l’on ne trouve pas dans les derniers millésimes, mieux maîtrisés oenologiquement).
A l’ouverture : DS16,5 – CDC16 – AA16,5
Après 5 heures d’aération : DS16,5 – LG16,5 – FM16 – HC17,5
Réglisse et graphite. Condensé, durable, et dynamique mais le message gustatif, sombre, sans réel éclat, reste assez simple (et je ne pense pas que le temps le complexifiera).
A l’ouverture : DS14,5 – CDC14,5 – AA15,5
Après 5 heures d’aération : DSED – LGED – FMED – HCED
On ne s’attardera pas sur cette cuvée faiblarde, sèche, dévalorisée par un goût de sauce soja pour le coup trop prononcé qui défigure irrémédiablement le vin.
A l’ouverture : DS16 – CDC17 – AA17
Après 5 heures d’aération : DS15,5 – LG15 – FM15,5 – HC16,5
Fumet viandé de nebbiolo composé de griotte, de tabac, de réglisse. Tannins imposants pour une trame rustique/rêche (ici aussi, on peut imaginer que la manière de produire le vin a énormément progressé en 15 ans).
A l’ouverture : DS15,5 – CDC16 – AA17,5
Après 5 heures d’aération : DS15 – LG15 – FM16 – HC16,5
Ce 2001 se montre légèrement oxydé, banal, fumé, avec des tannins anguleux. Le nez tertiaire (bouquet garni, céleri, …) pouvant rappeler celui d’un vieux St-Emilion au message plutôt creux. Tannins autoritaires moins extrêmes que dans le cas du Mont d’Oca Dardi 2001 toutefois. L’ennui s’installe dans cette verticale qui dévisse cruellement …
A l’ouverture : DS15 – CDC14 – AA16
Après 5 heures d’aération : DS13 – LG13 – FMED – HCED
Pas grand-chose à signaler en raison d’une matière bien légère marquée encore une fois par le soja. Autant les vins les plus récents se montrent vaillants, complexes, distingués et captent l’attention, autant les vins plus âgés (mais pas très vieux pour autant, si l’on compare aux endurantes productions bordelaises) laissent indifférent.
A l’ouverture : DS15,5 – CDC14 – AA16,5
Après 5 heures d’aération : DS14 – LG13 – FM14 – HC14
Fluide, simple, acidulé, atone …
A l’ouverture : DS15,5 – CDC14,5 – AA17,5
Après 5 heures d’aération : DS14,5 – LG14 – FM14,5 – HC15
Olfaction avancée, chair simpliste, acidulée, aux tannins nullement assagis. On ne décèle pas une grande maîtrise dans ce vin. J’ai évoqué un souci de stockage pour le Vigna Rué 2011. Est-ce ici également le cas (ce ne doit a priori pas l’être puisque les vins proviennent du domaine ; à moins que le domaine ne dispose pas de locaux appropriés) ou bien sommes-nous confrontés à un manque de maîtrise technique coupablement récurrent ?
Conclusion sur les impressions après 5 heures d’aération
Très intéressante dégustation, avec des vins jeunes en style traditionnel brillants, plus abordables dans leur jeunesse que les meilleurs Bordeaux (j’ai la chance d’être souvent témoin de leur capacité de grande garde).
On retrouve dans les vins les plus récents l’alliance possible de la puissance et de l’élégance, ces splendides notes classiques de fleurs, de fruits, d’épices, de zestes d’agrumes, de quinquina (et les fins amers associés) pour des équilibres maîtrisés (tryptique alcool, acidité, tannins fins/poudreux).
Viennent ensuite malheureusement dans une spectaculaire dégringolade des vins plus anciens pas vraiment à la hauteur, bancals, usés, rustiques, ennuyeux.
J’ai pu boire de nombreux Baroli récemment, plutôt jeunes il est vrai (moins de 20 ans) et issus des meilleurs domaines (B. Mascarello, Burlotto, Massolino, Oddero, Aurelio Settimo, …).
Et j’ai observé de nombreuses fois d’anormaux signes de vieillissement prématuré (soja, matière affectée, besogneuse) pour des vins pourtant âgés de 10 à 15 ans seulement (Aurelio Settimo Rocche dell’Annunziata et Rocche Riserva 2009, Bartolo Mascarello 2008 et à moindre titre 2004, Oddero Mondoca di Bussia Soprana 2000, Massolino Vigna Rionda Riserva 2009, …).
Cela met encore une fois en cause la capacité de garde du nebbiolo et j’ai du mal à imaginer que de tels vins fatigués/cuits puissent être capables d’une improbable résurrection.
Un sujet que nous avions évoqué avec Fabio Alessandria de Burlotto, qui recommande (seulement) 10 ans de garde. Lors de la verticale (2011/1997) organisée en sa présence, nous avions également constaté pas mal de déchets sur les vins les moins jeunes … pour ne pas dire les plus vieux … (il est vrai qu’il n’était pas au domaine à cette époque, aurait-il fait mieux ?).
On se réjouit donc de constater que de grands progrès œnologiques, sur l’extraction tannique en particulier, semblent avoir été effectués dans cette formidable région viticole depuis 10 ans.
Je manque de recul sur des vins plus anciens cela dit et il faudra suivre l’évolution sur plusieurs décennies de vins puissamment structurés comme les 2010 et les 2016 (Rué semblant en général plus aimable et abordable que Bussia).